À Nairobi, le mécontentement est palpable. Jeudi, des centaines de protestataires ont afflué vers le cœur de la capitale kényane, agitant des pavillons nationaux et chantant des slogans appelant à la démission d’Eliud Lagat, le chef adjoint de la police nationale qu’on accuse directement dans l’affaire de la mort en détention d’Albert Ojwang, un blogueur politique âgé de 31 ans.

Deux voitures ont été enflammées au milieu de la foule, pendant que les forces policières ont recouru au gaz lacrymogène pour disperser les manifestants. Sur quelques affiches, l’image de Lagat était présentée, accompagnée de la mention : « Lagat must go ».

Albert Ojwang a été appréhendé pour avoir exprimé des critiques sur la police sur les plateformes de médias sociaux. D’après l’interprétation initiale des autorités, il se serait porté un coup mortel en heurtant la tête contre le mur de sa cellule. Toutefois, les résultats de l’autopsie ont contredit cette hypothèse : les experts médico-légaux ont noté un traumatisme crânien, une compression cervicale et des blessures internes — des indices qui concordent avec une agression suivie d’un étranglement.

Dans la rue, la tension reste vive. Collins Oganda, l’un des manifestants, s’est exprimé avec gravité : « J’aimerais dire au gouvernement que cela ne cessera pas tant que justice ne nous aura pas été rendue, tant qu’il ne nous aura pas entendus. Tant qu’il n’aura pas écouté la voix de la jeunesse qui constitue la majorité de la population de ce pays, rien ne s’arrêtera. Et tant que justice ne sera pas faite pour Albert, le combat continuera. Ce n’est que le début. Je sais qu’ils me recherchent, tout comme ils ont traqué Albert. Mais entre défendre la patrie et mourir, nous sommes prêts à assumer les deux. »

 

Devant l’escalade de la colère, la pression politique s’est intensifiée. William Ruto, le président, a publiquement admis qu’Albert Ojwang était effectivement décédé : « aux mains de la police », contredisant ainsi la version officielle initiale. L’inspecteur général de la police, Douglas Kanja, a également fait volte-face, présentant ses excuses devant le Sénat et admettant que la thèse du suicide était infondée.

Une enquête a été lancée par l’Autorité indépendante de contrôle de la police, alors que l’Union européenne et les États-Unis demandent une enquête claire et ouverte. L’affaire Ojwang, déjà vue comme un emblème de l’impunité policière, pourrait représenter un point de basculement dans les rapports entre la jeunesse du Kenya et les structures de sécurité.

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