Statbel et le Bureau Fédéral du Plan viennent de publier les toutes dernières statistiques démographiques en Belgique. Ces prévisions ont été finalisées avant la conclusion des discussions pour la création du nouveau gouvernement fédéral, et n’intègrent donc pas les éventuels impacts des décisions évoquées dans l’accord de gouvernement. Il est néanmoins intéressant de les examiner attentivement.

L’augmentation de la population continue d’être principalement alimentée par la migration.
Deux phénomènes se combinent pour donner lieu à une telle prévision.

Premièrement, le solde migratoire international est prévu pour se stabiliser entre le milieu des années 2030 et 2070 avec un chiffre qui devrait tourner autour de 30.000 individus par an, donc une stabilisation à un niveau positif. Le « solde migratoire international » fait référence à la différence entre le total des entrées sur le territoire (l’immigration internationale) et le total des sorties du territoire (l’émigration internationale).

D’après la même recherche, d’ici à 2070, l’immigration pourrait grimper à 165 000 individus par an tandis que l’émigration pourrait toucher 134 000 personnes. Il y aurait alors plus d’individus qui entrent dans notre pays, que de ceux qui le quittent.

« Il faut savoir que si l’on fermait la Belgique complètement et que l’on vivait en vase clos, explique le démographe à l’UCLouvain Bruno Masquelier, on aurait moins de Belges chaque année très rapidement. Ce n’est pas une surprise et c’est le cas dans bien d’autres pays. Par exemple, la croissance de l’Union européenne est négative également. En Belgique ce qui nous attend c’est un ralentissement démographique qui est freiné par cet apport migratoire ».

En ce qui concerne des mesures politiques par rapport à la migration, Bruno Masquelier nuance : « Il y a toujours les intentions politiques et il y a la traduction dans les faits. La littérature montre bien que les politiques migratoires n’ont pas toujours les effets escomptés. Il y a même parfois pas mal d’effets pervers, et un contrôle plus strict ne va pas forcément se traduire par une immigration moins importante ».

Pour comprendre pourquoi la migration reste le principal facteur de l’accroissement de la population, il faut également considérer le taux d’augmentation naturelle négatif. C’est la différence entre le nombre de naissances et le nombre de décès. À partir de la fin des années 2030, ce solde devient déficitaire.

« En Allemagne, en Italie, au Japon, en Ukraine ou même en Chine, ajoute le démographe Bruno Masquelier, les taux d’accroissement naturels sont également négatifs. La Belgique ne tiendra donc pas une situation exceptionnelle ».

L’évolution du nombre de naissances est en recul depuis 2010. Le nombre moyen d’enfants par femme était de 1,46 en 2024. Vers le milieu des années 2030, la moyenne d’enfants par femme se fixe à environ 1,6. Cette supposition, établie à l’échelle régionale, repose sur le modèle ReNaissance (Université d’Anvers) à moyen terme (2035), et pour le long terme, elle s’appuie sur les conseils d’experts. Et Bruno Masquelier ajoute :

« Même à 1,6 enfant par femme, on reste sous la barre des 2,1, ce que l’on appelle « le seuil de remplacement des générations ». On est donc en dessous du niveau qu’il nous faut pour qu’une génération de parents se renouvelle dans une génération d’enfants ».

En somme, une diminution globale des naissances coexiste avec une hausse de l’espérance de vie et un processus de vieillissement de la population. En 2070, l’espérance de vie moyenne s’élève à 89,8 ans pour les femmes et à 88,1 ans pour les hommes.

« Si l’on coupe la population en trois tranches d’âges (les moins de 18 ans, les 18-67 et les 67 et plus), continue Bruno Masquelier, à peu de chose près, la seule tranche d’âge qui va connaître encore une croissance en Belgique ce sont les 67 ans et plus ».

Ainsi, l’indice de dépendance, représentant la part de personnes âgées de 67 ans et plus par rapport à la population en âge de travailler (c’est-à-dire les actifs), connaît une nette augmentation. Si en 2024, on comptait 28 individus âgés de 67 ans et plus pour chaque 100 personnes ayant entre 18 et 66 ans, ce chiffre pourrait grimper à 37 en 2040 et atteindre 43 en 2070.